Rappel pour la Dernière de la saison 2016-2017

Le 4 juillet, nous terminerons avec une séance participative du café littéraire. Chacun aura choisi un livre qui répond aux deux-critères-de-Mireille© et disposera d’un petit temps soit pour en présenter la teneur, soit pour en lire un court extrait. Retenir un livre selon le principe des deux-critères-de-Mireille© consiste à répondre conjointement OUI à ces deux questions : vais-je le relire? vais-je l’offrir ?

Lectures à partager

Pour participer au jury du Prix des lecteurs du Festival des Littératures Européennes de Cognac, qui aura lieu du 16 au 19 novembre 2017 sur le thème Les îles de la Méditerranée, rendez-vous à la médiathèque de St Georges d’Oléron, le mardi 20 juin à 17 h. Vous pouvez dès à présent vous inscrire comme membre du jury et emprunter les six ouvrages.

Un mot pour se réjouir du Prix du Livre Inter 2017 accordé à Jean Baptiste Del Amo pour Le Règne Animal (Gallimard, 2016)

Fanny Z, de Josèphe Viallard

Anny présente J. Viallard, notre invitée, déjà familière du Café Littéraire puisqu’elle était parmi nous lors de la rencontre avec M.H. Lafon (14 mai 2016). Si elle vit en Corrèze, contexte du roman que nous abordons ici, elle séjourne en effet volontiers sur l’île d’Oléron.

Fanny Z est un premier roman publié aux éditions Les Ardents (2017). Josèphe Viallard dit avoir écrit dès son plus jeune âge. Elle a d’abord écrit des nouvelles, puis a éprouvé l’impérieux besoin de «passer du sprint au marathon». Comme Fanny, son personnage, «écrire dans la durée l’a toujours tentée» (p. 25) ; comme Fanny, «elle corrige, reprend des passages, alimente, nourrit des scènes par des anecdotes /…/ des articles d’historiens et universitaires régionaux» (p. 169) ; comme Fanny, «elle s’adonne à une lecture systématique d’auteurs pour épauler sa démarche créatrice /…/ elle a besoin de lire pour écrire» (p. 162). Les deuxième et troisième romans sont en cours.

Comment parler de ce «roman familial» sans le déflorer eu égard à ceux qui n’ont pas encore eu le plaisir de le découvrir ? Comment dire la complexité des personnages et des événements sans dénouer les finesses du scénario ?

Ce roman en effet exige des lecteurs qu’ils sachent tisser des liens, qu’ils construisent du sens à partir des indices que l’auteur distille à l’envi. Beaucoup parvenus à la dernière ligne de la dernière page ont eu l’irrésistible besoin de relire le roman tant le propos est à la fois subtil et énigmatique. J. Viallard, elle-même, s’étonne parfois des interprétations que lui proposent ses lecteurs auxquels elle offre de correspondre avec Fanny Zimmer, l’héroïne de roman, en lui écrivant à fannyzim1149@gmail.com. Voilà une voie fort originale pour que «la fiction nous révèle la vérité».

En guise de résumé, on pourrait dire que St Serein, village corrézien sert de refuge à Fanny Zimmer, reporter venue se ressourcer, à son retour de Gaza, dans la maison de sa grand-mère Rachel Zimmer, elle-même réfugiée dès 1942 dans la famille Garat, alors que ses parents ont été déportés. Fanny va alors découvrir pas à pas de terribles secrets familiaux. Elle se met en quête de vérité en s’appuyant sur des documents, parfois tronqués (Le journal de Rachel) et des témoignages, parfois mensongers. Avec elle, le lecteur tente d’y voir clair au delà de la multiplicité et de la duplicité des protagonistes. De découverte en découverte, il apprend que «Fanny voulait fuir son existence déchiquetée mais ne pensait pas rencontrer aussi fortement celle d’une autre pareillement mutilée» (p. 105). Comme Rachel, Fanny n’a eu d’autre choix que «partir ou mourir» (p. 131). Fanny et Rachel, deux femmes d’exception pour nous faire entendre «la résonnance des temps».

Josèphe Viallard nous éclaire volontiers sur sa démarche rédactionnelle ; elle a lu, écouté des anecdotes, repris des bribes de récits entendus chez une amie juive, s’est informée sur les faits attestés de Résistance en Limousin, etc. Elle écrit une «histoire» qui peut être différente de celle que nous propose «l’Histoire Nationale». Au final, comme elle laisse ses personnages vivre leur vie, elle laisse subsister les doutes ; elle fournit des indices mais délivre un récit mystérieux et composite. A cette fascinante complexité du scénario s’ajoutent la mosaïque des modes d’écriture – récit narratif, journal intime, lettre, mail, embryon de roman- et le mélange des genres – roman régional, historique, policier, voire autobiographique … D’aucuns apprécient en effet d’y trouver moult références des lectures de Fanny, alias Josèphe, de ses musiques préférées, d’autres relèvent quelques traits d’humour caustique à l’égard du pédant ou du hiérarque de service, d’autres encore se régalent à relever ici et là quelques savoureuses tournures régionales qu’on trouverait probablement dans «les gnorles sur les Anciens».

Surprenante, cette séance du Café ! Surprenantes les interventions passionnées qu’échangent les lecteurs pour brosser à leur tour un portrait des personnages ou tenter une explication à leur comportement, l’affreux Charles, ou le curieusement taiseux Marc, ou Louis qui sait tout mais ne peut pas dire, ou encore Paolo, le si présent disparu. L’auteur apprécie que ses lecteurs tentent de reconstituer les faits, aient à construire et vérifier ou réfuter leurs propres hypothèses. Voilà encore un vigoureux moment de Lector in fabula ! Josèphe Viallard a promis de revenir.

Un grand merci à nos deux fidèles libraires et à l’équipe de la Médiathèque pour son indéfectible support.

Compte-rendu du Café Littéraire du 6 juin 2017